Prise de position de l’AMM sur les directives éthiques pour le recrutement des médecins au niveau international


Adoptée par la 54ème assemblée générale de l’AMM, Helsinki, Finland, septembre 2003
Révisée par la 65ème assemblée générale de l’AMM, Durban, Afrique du sud, octobre 2014
et par la 76ème Assemblée générale de l’AMM, Porto, Portugal, octobre 2025

 

PRÉAMBULE

La main-d’œuvre médicale est essentielle aux systèmes de soins mondiaux. La croissance de la population dans certaines parties du monde, combinée au vieillissement de la population d’autres régions, a contribué à des pénuries de main-d’œuvre de santé. Bien qu’il soit nécessaire de planifier le maintien d’une main-d’œuvre nombreuse et complète aux niveaux national et international, cela n’a pas toujours été une priorité. Il en résulte une pénurie mondiale de médecins, même dans les pays les plus riches. L’une des principales raisons de cette pénurie est que les médecins sont formés en nombre insuffisant pour satisfaire aux besoins du pays. Parmi les autres raisons, on trouve le recrutement de médecins pour d’autres professions, leur retraite anticipée, leur émigration, la maladie (y compris des problèmes de santé mentale) et les difficultés de concilier responsabilités professionnelles et familiales. Toutes ces raisons sont liées aux conditions de travail médiocres des médecins.

Les médecins ont de bonnes raisons d’émigrer. Par exemple, ils cherchent à faire évoluer leur carrière et à échapper à de piètres conditions de vie et de travail, ce qui peut aller de pair avec la recherche de plus de libertés politiques et personnelles ou d’autres avantages. L’AMM est consciente que les séjours temporaires de médecins à l’étranger, où ils peuvent travailler et se former dans le cadre de systèmes de santé différents, permettent l’échange de connaissances, de compétences et de bons comportements médicaux, au bénéfice du pays émetteur comme du pays d’accueil. L’échange de professionnels de la médecine est donc profitable au développement de la médecine et des systèmes de santé et justifie généralement le soutien des membres constituants et des gouvernements.

La résolution de l’AMM sur la main-d’œuvre médicale (2023) souligne la nécessité de mesures complètes et égalitaires entre les hommes et les femmes pour garantir le bien-être et la sécurité des médecins, via un environnement de travail adéquat, y compris en situation d’urgence, en insistant fortement sur la responsabilité de l’employeur à cet égard. L’AMM réaffirme également ses politiques sur la non-discrimination vis-à-vis des médecins en matière d’affiliation et d’activités professionnelles, sur le transfert de tâches depuis la profession médicale et sur la pénalisation de la pratique médicale.

L’AMM souligne l’existence du WHO Global Code of Practice on the International Recruitment of health Personnel (Code mondial de bonnes pratiques de l’OMS pour le recrutement international des personnels de santé), élaboré pour promouvoir des principes et des pratiques volontaires pour un recrutement international éthique du personnel de santé et pour contribuer au renforcement des systèmes de santé. Ce Code tient compte des droits, des obligations et des attentes des pays de départ, des pays de destination et du personnel de santé en situation de migration.

Le Global health and care worker compact[1] (Guide mondial du personnel des soins de santé) de l’OMS fournit aux États membres, aux parties prenantes et aux autres organisations des directives techniques pour les aider à protéger les travailleurs des soins de santé et leurs droits et à promouvoir et assurer des conditions de travail décentes, exemptes de toute forme de discrimination, raciale ou autre, et un environnement d’exercice sûr et favorable, conformément au Code mondial de bonnes pratiques de l’OMS pour le recrutement international des personnels de santé.

 

RECOMMANDATIONS

L’AMM exprime les recommandations suivantes, lesquelles visent à assurer le bien-être et la sécurité des médecins par un environnement de travail adéquat dans les pays de départ et de destination :

  1. Les membres constituants, les gouvernements et les employeurs devraient faire preuve de diligence dans le recueil de données relatives à la main-d’œuvre médicale. Ces données peuvent être utilisées pour créer, renforcer et entretenir un système d’information relatif au personnel de santé ; idéalement, il devrait être disponible en temps réel, pour une meilleure réactivité. La mise en place d’observatoires de la démographie médicale devrait être encouragée.
  2. Chaque pays devrait faire son possible pour former un nombre adéquat de médecins, en prenant en compte ses besoins comme ses ressources. Un pays ne devrait pas compter sur l’immigration en provenance d’autres pays pour satisfaire son besoin de médecins. Les pays devraient explorer des stratégies visant à atténuer les effets négatifs de la migration des médecins sur les pays « d’origine ».
  3. Chaque pays devrait allouer des ressources au maintien de ses médecins dans la profession et sur le sol national (y compris les ressortissants qui ont étudié la médecine ailleurs), en leur accordant le soutien dont ils ont besoin pour remplir leurs objectifs personnel et professionnel, en tenant compte des priorités du pays. Cela comprend une initiation complète pour les médecins découvrant le pays et son mode de fonctionnement professionnel. Tous les pays doivent garantir des conditions de travail adéquates aux médecins, y compris, mais sans s’y limiter, des conditions de travail sûres, des horaires de travail gérables, l’accès aux ressources essentielles, y compris le soutien au bien-être, et des possibilités d’avancement professionnel.
  4. Les médecins ne devraient pas être empêchés de quitter leur pays d’origine ou d’adoption pour trouver de meilleures perspectives de carrière à l’étranger.
  5. Les pays qui recrutent ou accueillent des médecins d’autres pays devraient assurer que les recruteurs donnent aux potentielles recrues des informations actualisées, complètes et exactes sur la nature et les conditions d’accès au poste à pourvoir, sur l’immigration, sur les conditions administratives et contractuelles à remplir et sur les conditions juridiques et règlementaires applicables à l’exercice de la médecine dans le pays recruteur, y compris les compétences linguistiques.
  6. Les médecins qui travaillent, de manière permanente ou temporaire, dans un pays autre que leur pays de naissance, pays d’adoption ou pays de formation, devraient être traités équitablement et sans discrimination vis-vis des autres médecins du pays dans tous les aspects du processus de recrutement et dans leur emploi (par exemple l’égalité d’accès au développement professionnel et l’égalité de rémunération pour un travail égal) ; des mécanismes de réclamation devraient être envisagés.
  7. Il convient de garantir aux médecins et à tout le personnel des soins de santé une rémunération juste et équitable, car il s’agit d’un élément important pour leur offrir des conditions de travail sûres, saines, solidaires et dignes.
  8. Les pays qui souhaitent recruter des médecins d’un autre pays ne devraient le faire que dans les conditions prévues par un protocole d’accord conclu entre les deux pays. Le recrutement international devrait en outre être « mené conformément aux principes de transparence, d’équité et de promotion de la pérennité des systèmes de santé dans les pays en développement »[2].
  9. Conformément au droit international, rien ne devrait empêcher des pays ou des établissements de santé de conclure des accords bilatéraux et des protocoles d’accord équitables, sous réserve que ces accords soient conformes au droit international des droits de l’homme, aux fins d’une coopération fructueuse en matière de prestation de soins, y compris par l’échange de médecins.
  10. Le système de suivi et de partage d’informations mis en place par l’OMS devrait être activement soutenu en vue d’une coopération internationale. Les parties prenantes devraient régulièrement consigner et partager leurs données, lesquelles devraient être analysées et faire l’objet d’un suivi par l’OMS. L’OMS devrait en outre fournir des retours d’information substantiels et critiques aux gouvernements. Ceux-ci devraient échanger des informations sur la manière dont ils ont surmonté les difficultés rencontrées.

 

[1] Friedman EA, Bickford R, Bjork C, et al. The global health and care worker compact: evidence base and policy considerations, BMJ Global Health 2023;8:e012337.
[2] Para. 3.5 du WHO Global Code of Practice on the International Recruitment of health Personnel

Prise de position
Autonomie, Autosuffisance, Formation des Médecins, Médecins, Migration, Recrutement

Résolution de l'AMM sur la Main d'Oeuvre Médicale

Adoptée par la 50ème Assemblée générale de l’AMM, Ottawa, Canada...

Prise de position de l'AMM sur le champ d'exercice, le partage et le transfert des tâches

Adoptée par la 60ème Assemblée Générale de l'AMM, New Delhi, Ind...

Résolution de l’AMM sur la Pénalisation de la Pratique Medicale

Adoptée par la 194e Session du Conseil de l'AMM à Bali, Avril 20...