Adoptée par la 229ème session du Conseil de l’AMM, Montevideo, Uruguay, avril 2025

PRÉAMBULE

Les piliers de la médecine qui étaient jusqu’à récemment considérés comme incontestables, tels que les preuves scientifiques, la dignité humaine et la solidarité, sont de plus en plus remis en question par l’essor d’idéologies et de positions politiques qui les rejettent ou les nient.

Dans ce contexte, la capacité des médecins à exercer leur profession de manière éthique et à respecter les règles de la profession s’en trouve menacée, tout comme l’autonomie de la profession ; l’intervention de la politique, du système judiciaire ou de la police dans le processus de soins devient de plus en plus une réalité dans de nombreuses régions du monde.

Les médecins subissent des pressions de la part de leurs gouvernements qui les obligent à traiter les patients détenus de manière contraire à l’éthique. Il existe également des actes de violence ouvertement dirigés contre le personnel soignant et les établissements de santé dans les zones de conflit armé et autres situations d’urgence.

Les pressions exercées sur l’autonomie professionnelle des médecins et sur leur capacité à respecter leurs règles éthiques peuvent nuire à la qualité des soins prodigués et, à terme, ébranler la confiance de la population envers la profession.

L’Association médicale mondiale a été fondée dans le but explicite d’établir les normes éthiques et humanistes les plus élevées pour la médecine dans le monde entier.

Ces normes sont actuellement remises en question par des idéologies et des positions politiques qui rejettent les acquis sociaux des 80 dernières années.

Ces normes éthiques et humanistes élevées doivent toutefois être fermement préservées par la profession médicale, avec une détermination et une force sans faille.

 

RECOMMANDATIONS

  1. L’Association médicale mondiale et tous ses Membres constituants s’engagent résolument à respecter les normes éthiques de la profession médicale, telles qu’elles ont été établies par la profession elle-même au cours des 80 dernières années.
  2. Il incombe à l’AMM et à ses Membres constituants de plaider en faveur d’un cadre juridique pour les soins de santé dans tous nos pays, respectueux des règles éthiques de notre profession et permettant l’exercice de la médecine en conformité avec celles-ci.
  3. L’AMM demande instamment aux gouvernements de garantir la sécurité et protéger la vie du personnel soignant, quelles que soient les circonstances, afin de leur permettre de s’acquitter de leur devoir d’assistance envers tout patient dans le besoin et d’agir conformément à leurs principes éthiques.
  4. L’AMM doit défendre avec détermination l’honneur de la profession médicale et les droits du personnel médical et des patients partout où ils sont menacés.
  5. Il est du devoir de l’AMM et de tous ses Membres constituants de soutenir les médecins à titre individuel et leurs organisations lorsque leur capacité à respecter les règles éthiques établies par l’AMM est menacée ou limitée en raison de pressions politiques ou judiciaires injustifiées.
  6. L’Association médicale mondiale et tous ses Membres constituants soutiennent fermement et encouragent la médecine scientifique fondée sur des preuves, y compris les mesures thérapeutiques et de santé publique éprouvées.
  7. L’Association médicale mondiale appelle au respect de l’indépendance de la recherche, conformément aux principes éthiques énoncés dans sa Déclaration d’Helsinki.

Adoptée par la 191e Session du Conseil de l’AMM à Prague,  avril 2012
et supprimée par la 71ème Assemblée générale de l’AMM (en ligne), Cordoue, Espagne, octobre 2020

 

INTRODUCTION

L’AMM est extrêmement inquiète des actions récentes menées par le gouvernement turque visant à réduire considérablement l’autorité autonome et l’indépendance de la profession médicale en Turquie. En particulier le récent Décret gouvernemental n° 663 sur l’organisation et les missions du Ministère de la santé et de ses organisations associées établit un Bureau des Professions de santé, contrôlé par le Ministère de la santé et auquel il délègue le pouvoir   pour certaines fonctions majeures qui devraient demeurer au sein de l’Association Médicale Turque, conformément aux principes de l’autonomie professionnelle et de l’autogouvernance des médecins. L’Association Médicale Turque avait été créée par le parlement turc en 1953 et le décret 663 a été passé par les ministres du gouvernement turc selon une procédure extraordinaire court-circuitant le parlement.

Il est très préoccupant de constater que l’Association Médicale Turque n’a plus le pouvoir de :

  • Etablir et diffuser des directives éthiques concernant la conduite des médecins
  • Mener des enquêtes sur des accusations de mauvaises pratiques de la part de médecins
  • Fixer des sanctions disciplinaires à l’encontre des médecins dans le cas de mauvaises pratiques
  • Rédiger le cursus des études médicales, des études de spécialisation et le contenu et l’accréditation de la formation médicale continue (la TMA accomplissait précédemment toutes ces tâches en partenariat avec les universités).

De plus , le décret 663 modifie l’Article 1 de la Constitution de l’Association Médicale Turque (à l’origine rédigée et adoptée par le parlement) et limite ainsi le mandat de la TMA de la manière suivante : « veiller à ce que la profession médicale soit exercée et promue en accord avec le bien-être et le bénéfice publics et individuels »  Du fait de la limitation de son mandat, la TMA n’a plus le droit de contester juridiquement les actions et la législation portant préjudice au droit à la santé, à la fourniture de soins de santé, à la santé publique et au bien-être individuel des patients.   On peut ainsi citer les  tentatives d’opposition au déremboursement de certains  actes médicaux par le système de santé national ou les actions menées contre les atteintes à la santé publique comme par exemple contre  l’utilisation du cyanure dans l’extraction et la transformation de l’or et de l’argent. Le mandat restreint de la TMA dans ce domaine non seulement porte atteinte à l’indépendance des médecins mais aussi met en danger la santé des patients.

RÉSOLUTION

Réitérant  son engagement sans équivoque pour l’indépendance et l’autogouvernance professionnelle de la profession médicale, telles que définies dans sa Déclaration de Madrid sur l’autonomie professionnelle et l’autorégulation et dans sa Résolution sur l’indépendance des Associations Médicales Nationales, le Conseil de  l’AMM :

1. Demande instamment au gouvernement turc de supprimer le décret 663 et de redonner  à l’Association Médicale Turque ses missions et ses responsabilités en matière d’autonomie professionnelle et d’autorégulation, dûment confiées par le Parlement en 1953 selon une procédure démocratique nationale légitime et transparente.

2. Demande instamment à tous les membres du Parlement qui sont médecins, quelle que soit leur affiliation politique, de ne pas oublier leurs devoirs en tant que responsables médecins et de défendre le droit de la profession médicale à l’autonomie et à l’autorégulation.

3. Soutient et félicite l’Association Médicale Turque et les membres du parlement turc qui ont protesté contre ces récentes décisions et qui  ont demandé un examen juridique de ce décret par le Conseil Constitutionnel.

Lance un appel à tous les médecins de Turquie et du monde pour qu’ils s’associent activement à la défense, à la promotion et au soutien de l’indépendance professionnelle, au droit à la santé et à la santé de la population turque.

Adoptée par la 191e Session du Conseil de l’AMM à Prague,  avril 2012.

PRÉAMBULE

L’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) regroupe les huit pays de l’Afrique de l’Ouest utilisant le Franc CFA comme monnaie. Cet outil d’intégration prône la libre circulation et le libre établissement des Médecins dans les pays de l’UEMOA.

Il existe un Collège des Ordres de Médecins, rassemblant les Ordres des pays membres de l’Union. Les Ordres souvent placés sous la tutelle des Ministères de la Santé. Cette situation restreint l’autonomie technique et administrative et entrave ainsi une bonne gestion de la cartographie médicale de la région, au détriment de l’accès aux soins de santé des populations.

RECOMMENDATION

Réitérant sa Déclaration de Madrid sur l’autonomie professionnelle et l’autorégulation et sa Résolution sur l’indépendance des Associations Médicales Nationales, l’AMM demande que l’indépendance, l’autonomie professionnelle et l’autorégulation soient garantie au sein des pays de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine

Adopté par la 189e session du Conseil de l’AMM, Montevideo, Uruguay, Octobre 2011 comme résolution du Conseil, adopté par la 62e Assemblée générale de l’AMM, Montevideo, Uruguay, Octobre 2011
et réaffirmée par la 217e Session du Conseil de l’AMM, Séoul (en ligne), Avril 2021 

 

Les Associations Médicales Nationales ont pour vocation de représenter leurs médecins et de négocier en leur nom, parfois en tant que syndicats ou instances de régulation, mais aussi en tant qu’associations professionnelles reflétant l’expertise des médecins dans le domaine de la santé publique et du bien-être.

Elles représentent les opinions de la profession médicale, y compris sa volonté d’assurer une pratique médicale éthique, des soins médicaux de bonne qualité et de faire respecter de hautes normes par tous les praticiens.

Ces associations peuvent aussi mener des campagnes ou des actions de sensibilisation/défense au nom de leurs membres, souvent dans le domaine de la santé publique. De telles actions ne sont pas toujours appréciées des gouvernements qui peuvent éventuellement considérer qu’elles s’inscrivent dans une opposition politique alors qu’en réalité elles reposent sur une compréhension des évidences médicales et sur les besoins des patients et des populations.

L’AMM est consciente qu’en raison de ces actions de défense/sensibilisation, certains gouvernements tentent de faire taire les associations médicales en   plaçant  leurs propres représentants à des postes de pouvoir au sein de ces associations afin que les messages soient plus acceptables pour eux.

L’AMM dénonce de tels comportements et exige qu’aucun gouvernement n’interfère sur l’indépendance des associations médicales nationales et sur leur fonctionnement.  Elle encourage les gouvernements à mieux comprendre les motivations de leurs associations médicales nationales, à considérer l’évidence médicale et à travailler avec les médecins pour améliorer la santé et le bien-être de leurs populations.

Adoptée par la 60e Assemblée Médicale Mondiale, New Delhi, Inde, Octobre 2009
et revisée par la 201e Session du Conseil de l’AMM à Moscou, Russie, Octobre 2015 

PREAMBULE

1. Cette politique vise à identifier les domaines où un conflit d’intérêts peut surgir au cours de l’exercice quotidien de la médecine et à aider les médecins à résoudre de tels conflits, dans le meilleur intérêt de leurs patients.  Un conflit d’intérêts se produit lorsque le jugement professionnel concernant les soins à apporter à un patient est influencé  de manière indue par des intérêts secondaires.

2. Dans certains cas, il peut suffire de reconnaître qu’un conflit réel ou potentiel existe. Dans d’autres cas, il peut être nécessaire de prendre des mesures spécifiques pour résoudre le conflit. Certains conflits d’intérêts sont inévitables et les conflits d’intérêt en médecine ne sont  pas intrinsèquement contraires à l’éthique. C’est la manière dont ils sont traités qui est essentielle.

3. Au delà de l’exercice clinique de la médecine et de la délivrance de soins, les médecins assument traditionnellement différentes fonctions  et poursuivent divers autres intérêts. Parmi ces intérêts,  la plupart louables et bénéfiques pour la société, figurent la participation à la recherche, l’éducation des futurs médecins ou la formation des médecins en exercice ainsi que des responsabilités administratives ou des fonctions de direction. Le secteur de la médecine ayant attiré des intérêts privés, il arrive que des médecins mettent leurs compétences également au service de ces intérêts, en occupant des postes de consultants (et parfois d’employés) dans des entreprises du secteur privé.

4. Même si la participation des médecins dans bon nombre de ces activités sera en fin de compte bénéfique pour le public, la priorité du médecin demeure la santé et le bien-être de ses patients. Les autres intérêts ne devraient pas entrer en conflit avec cette obligation première ou influencer les décisions cliniques (même de manière potentielle).

5. Tous les médecins ont le devoir moral d’analyser leur propre comportement dans l’optique d’éventuels conflits d’intérêts même si les conflits n’entrent pas dans le type d’exemples ou de situations traités dans ce document. Lorsqu’ils ne sont pas reconnus, les conflits d’intérêts peuvent sérieusement miner la confiance des patients dans la profession médicale et dans le praticien en particulier.

6. Les médecins peuvent éventuellement souhaiter profiter eux-mêmes de ressources supplémentaires telles que les sociétés de médecine, les associations médicales nationales ou les instances de contrôle. Ils devraient connaître dans ce cas la réglementation et les lois nationales en vigueur

RECOMMANDATION

Recherche

7. Les intérêts du clinicien et du chercheur peuvent ne pas être les mêmes. Si la même personne assume les deux fonctions, comme c’est souvent le cas, le conflit potentiel devrait être réglé en mettent en place des mesures appropriées pour protéger les patients, y compris en informant ces derniers du conflit potentiel.

Comme mentionné dans la Déclaration d’Helsinki:

7.1 La Déclaration de Genève de l’Association Médicale Mondiale engage les médecins dans les termes suivants : « La santé de mon patient sera mon premier souci » et le Code international d’éthique médicale énonce que « le médecin devra agir uniquement dans l’intérêt de son patient lorsqu’il lui procure des soins qui peuvent avoir pour conséquence un affaiblissement de sa condition physique ou mentale ».

7.2 La Déclaration d’Helsinki stipule que “Si l’objectif premier de la recherche médicale est de générer de nouvelles connaissances, cet objectif ne doit jamais prévaloir sur les droits et les intérêts des personnes impliquées dans la recherche.”

8. La recherche devrait être conduite avant tout pour faire progresser la science médicale. Un médecin ne devrait jamais faire passer  ses intérêts financiers avant le bien-être de son patient. Les intérêts des patients et l’intégrité scientifique devraient être prioritaires.

9. Il faut informer de l’ensemble des relations et intérêts matériels du chercheur-médecin  les éventuels participants à une recherche les comités d’éthique de la recherche, les instances de contrôle et de régulation concernées, les revues médicales, les participants à une conférence et le centre médical où est menée la recherche.

10. Tous les essais devraient être enregistrés et figurer dans un registre des recherches accessible au public

11. Un contrat clair devrait être signé par toutes les parties, y compris les sponsors, les chercheurs et les participants au programme,  avec un minimum de clarifications :

–  rémunération financière pour le chercheur-médecin (qui ne doit pas excéder la perte financière liée au non exercice de son activité normale de médecin)

–  le propriétaire des résultats de la recherche (qui seront détenus par le chercheur)

–  le droit du chercheur de publier des résultats négatifs,

–  Le droit du chercheur de fournir des informations aux personnes participant aux essais à tout moment en cours d’étude.

12. Les chercheurs-médecins devraient exercer un contrôle, avoir un accès complet à toutes les données des essais et refuser les clauses de non divulgation.

13. Indépendamment des résultats de la recherche, les chercheurs-médecins devraient veiller à ce que la présentation ou la publication des résultats ne soit pas indûment retardée ou bloquée.

14. Des primes ne devraient pas être acceptées pour avoir fourni le nom des participants potentiels à la recherche et les informations sur les patients ne devraient pas être transmises sans le consentement des patients, sauf si la réglementation ou les instances de contrôle l’imposent.

15. Tout dédommagement reçu des sponsors des essais  ne devrait pas excéder la perte financière liée au non exercice de son activité normale de médecin et devrait être à la hauteur des efforts du médecin menant la recherche. Lorsque le recrutement demande une grande implication et du temps, une rémunération complémentaire peut être envisagée pour dédommager le chercheur clinicien ou l’institution en particulier pour les efforts et le temps consacrés au recrutement de participants à la recherche.  Des bonus progressifs versés dans le but d’augmenter le nombre de participants à la recherche ne devraient pas être acceptés.

16. Les chercheurs-médecins devraient refuser d’étudier des demandes de subvention ou des soumissions d’articles de recherche de la part de collègues ou de concurrents si leurs relations risquent d’influencer leur jugement sur le dossier.

17. Des paiements ou des dédommagements de quelque nature que ce soit ne devraient pas être liées aux résultats des essais cliniques. Les chercheurs-médecins ne devraient pas avoir d’intérêts financiers dans une entreprise subventionnant un essai ou un produit étudié si ces intérêts risquent de varier positivement ou négativement en fonction des résultats de l’essai ; il ne devrait pas y avoir d’enjeu financier direct pour eux  lié aux résultats de l’essai. Ils ne devraient pas acquérir, acheter ou vendre  des actions de l’entreprise pendant la période des essais et jusqu’à ce que les résultats aient été publiés. Ces consignes pourraient ne pas s’appliquer aux médecins qui ont mis au point un médicament mais qui ne prennent pas part à la procédure de recrutement aux essais.

18. Les chercheurs-médecins devraient participer uniquement aux essais cliniques qui entrent dans le champ de leurs compétences médicales et devraient avoir une formation adéquate sur la conduite d’une recherche et sur les principes de l’éthique de la recherche.

19. Les droits d’auteur devraient être définis avant le début de l’essai et devraient être basés sur une importante contribution scientifique.

Les essais ne devraient pas interrompus uniquement pour des intérêts financiers

Education

20. Les besoins éducatifs des étudiants et la qualité de leur formation doivent être jaugés en fonction des meilleurs intérêts des patients. En cas d conflit d’intérêts, les intérêts du patient sont prioritaires.

21. Tout en reconnaissant que les élèves en médecine ont besoin d’une expérience sur des patients réels, les enseignants-médecins devraient veiller à ce que ces élèves  soient supervisés à la hauteur de leur niveau de formation.

22. Les patients devraient savoir qu’ils peuvent éventuellement être soignés en partie par des étudiants et des médecins en formation, y compris pour les procédures et les actes chirurgicaux, et devraient pouvoir donner ou non leur consentement éclairé.

23. Les patients devraient connaître l’identité et le niveau de formation des personnes qui participent à leurs soins.

24. Le refus du patient de se faire soigner par du personnel en formation ne devrait pas affecter l’importance et la qualité des soins qu’il recevra ensuite.

Auto-prescriptions et honoraires partagés

25. Toutes les prescriptions et ordonnances (qu’il s’agisse de biens ou de services spécifiques) devraient reposer sur une évaluation objective de la qualité du médecin (ou du service) auquel le patient est adressé.

26. Le fait pour des médecins d’adresser des patients à des établissements médicaux (par ex. des laboratoires) où ils ne sont pas professionnellement actifs mais où ils ont un intérêt financier s’apparente à de l’auto-prescription. Potentiellement cette pratique peut influencer beaucoup les décisions médicales et n’est pas jugée acceptable à moins que la communauté en question n’ait besoin d’un établissement et qu’il n’y en ait pas d’autres (par ex. dans les petites communautés rurales). Le médecin dans ce cas ne devrait pas percevoir davantage d’argent qu’un investisseur classique.

27. Des commissions (ou partage des honoraires)  existent lorsqu’un médecin perçoit de l’argent pour avoir adressé un patient à un praticien donné ou avoir prescrit un service spécifique donnant lieu au versement d’honoraires. Cette pratique est inadmissible.

Cabinets médicaux

28. Pour des raisons de commodités pour les patients, de nombreux cabinets médicaux sont situés à proximité d’autres établissements médicaux comme par ex. des laboratoires, des pharmacies et des opticiens. Le médecin ne devrait pas recevoir de rémunération financière ou d’autres avantages pour avoir adressé des patients à ces établissements ou pour être installé à proximité de ces derniers. Un immeuble appartenant à un  médecin ne devrait pas être loué à des prix supérieurs ou inférieurs à ceux du marché.

29. Les produits non médicaux (ceux n’ayant rien à faire avec la santé des patients ou l’exercice de la médecine) et des produits médicaux scientifiquement non validés scientifiquement ne devraient pas être vendus dans un cabinet médical. Si des produits médicaux scientifiquement validés sont vendus en cabinet médical, leur prix de vente devrait se limiter aux coûts engendrés pour se les procurer  et les produits devraient être proposés d’une manière telle que le patient ne se sent pas contraint de les acheter.

Conflits entre entreprises/établissements

30. Les établissements de santé en particulier sont de plus en plus sujets à de nombreuses pressions menaçant plusieurs de leurs missions et beaucoup de centres médicaux académiques ont commencé à rechercher d’autres sources de revenus. Il faudrait instaurer des politiques veillant à ce que ces nouvelles sources ne soient pas en conflit direct avec les valeurs et la mission de l’établissement (par ex. financement des écoles de médecine par l’industrie du tabac).

31. Les organisations et les institutions médicales (y compris mais sans s’y limiter, les écoles de médecin, les hôpitaux, les associations médicales nationales et les centres de recherches) devraient établir et si possible appliquer des directives régissant les conflits d’intérêts, à l’attention de leurs employés et de leurs membres.

32. Les chercheurs-médecins et autres tireront profit de la création de directives officielles régissant les conflits d’intérêts. Elles les aideront à faire connaître et à identifier clairement les situations où en raison d’un éventuel conflit, ils devraient refuser de participer à une étude ou à une autre activité.

33. Les établissements de santé académiques devraient fixer des limites précises entre les comités chargés des investissements, le transfert technologique et la branche recherche de l’établissement.

34. Des politiques écrites devraient contenir des directives sur la divulgation ou le refus de participation à une procédure décisionnaire, à l’attention des personnes qui sont en situation conflictuelle parce qu’une recherche est sponsorisée, parce qu’il existe des contrats de consultants, des holdings privés ou des accords de licence.

Adoptée par la 55e Assemblée générale de l’AMM, Tokyo, Japon, Octobre 2004,
et révisée par la 60e Assemblée générale de l’AMM, New Delhi, Inde, Octobre 2009
et par la 71e Assemblée générale de l’AMM (en ligne), Cordoue, Espagne, Octobre 2020

PRÉAMBULE

Pour traiter leurs patients, les médecins utilisent des médicaments, des instruments, des outils de diagnostic, des équipements et des produits conçus et fabriqués par des entreprises commerciales. L’industrie dispose de moyens pour financer des programmes de recherche et de développement coûteux qui nécessitent impérativement les connaissances et l’expérience de médecins. En outre, le soutien de l’industrie permet de poursuivre la recherche médicale, les conférences scientifiques et la formation médicale permanente qui peuvent être bénéfiques aux patients et à l’ensemble du système de santé. La combinaison des ressources financières et des connaissances sur les produits du côté de l’industrie et des connaissances médicales du côté des médecins permet le développement de nouvelles méthodes diagnostiques, de nouveaux médicaments, de nouvelles thérapies et de nouveaux traitements pouvant conduire à de grandes avancées médicales.

Il existe toutefois des conflits d’intérêts entre les entreprises commerciales et les médecins. Ces conflits peuvent porter préjudice aux soins des patients et à la réputation de la profession médicale. Le devoir du médecin est d’évaluer objectivement ce qui est le mieux pour le patient. En parallèle, les entreprises commerciales escomptent des profits pour les propriétaires lorsqu’elles vendent leurs produits et elles se concurrencent auprès de la clientèle. Des considérations commerciales peuvent nuire à l’objectivité du médecin, notamment si le médecin est d’une certaine façon dépendant de l’entreprise.

Plutôt que d’interdire toute relation entre les médecins et l’industrie, il est préférable d’établir des directives pour ces relations. Ces directives doivent contenir les principes essentiels de communication des informations, de transparence, de résistance aux conflits d’intérêts et de préservation de l’indépendance clinique du médecin afin qu’il puisse agir au mieux des intérêts des patients.

Ces directives qui règlementent les relations entre médecins et entreprises commerciales doivent être entendues à la lumière des principes éthiques de l’AMM, tels qu’ils sont décrits dans la Déclaration de Genève, la prise de position sur le conflit d’intérêts, la déclaration de Séoul sur l’autonomie professionnelle et l’indépendance clinique et le code international d’éthique médicale de l’AMM.

Les principes d’autonomie et d’indépendance clinique des médecins devraient se refléter dans toutes les décisions prises par les médecins pour les patients, quel soit leur environnement de travail : subventionné par l’État, privé, à but lucratif ou non, financé par des investisseurs, la compagnie d’assurance d’un employeur ou autre.

Les cursus des facultés de médecine et des programmes d’internat et de résidence devraient comporter des cours sur la relation entre entreprises et la profession médicale à la lumière des principes éthiques et des valeurs de la profession.

 

RECOMMANDATIONS

Conférences médicales

  1. Ces directives relatives aux conférences médicales s’appliquent, le cas échéant, aux évènements organisés sous l’égide d’entreprises, ainsi qu’aux évènements éducatifs et aux activités de promotion, y compris de dispositifs médicaux, parrainés par une entreprise commerciale. 
  1. Les médecins peuvent participer à des conférences médicales subventionnées pour tout ou partie par une entité commerciale si ces conférences respectent les principes suivants :
    • Le principal objectif de la conférence est l’échange d’informations professionnelles ou scientifiques dans l’intérêt des soins au patient.
    • L’hébergement pendant la conférence doit être secondaire à l’échange professionnel d’informations et ne doit pas excéder ce qui est habituellement et généralement acceptable localement.
    • Les médecins ne perçoivent pas de rémunération directement d’une entreprise commerciale pour couvrir les frais de voyage et de séjour (les leurs ou ceux d’une personne qui les accompagne) à l’occasion de la conférence ou à titre de compensation pour le temps qu’ils y consacrent, à moins que la loi ou la politique de leur association médicale nationale l’autorise ou à moins que cette compensation remplace des honoraires raisonnables rétribuant une prise de parole lors de la conférence.
    • Le nom de l’entreprise commerciale apportant un soutien financier est rendu public pour permettre à la communauté médicale et au public d’évaluer justement les informations communiquées à la lumière de la source de financement. De plus, les organisateurs de la conférence et les conférenciers se doivent de faire preuve de transparence et d’informer les participants de tout lien financier qui pourrait influencer les activités d’enseignement ou toute autre retombée de la conférence.
    • Conformément aux Directives de l’AMM pour les interventions médiatiques promotionnelles des médecins, la présentation d’un produit par un médecin est scientifiquement exacte, analyse objectivement toutes les autres options thérapeutiques possibles et n’est pas influencée par l’organisation qui subventionne l’évènement.
  1. Une conférence peut en outre se justifier au titre de la formation continue ou du perfectionnement professionnel que si elle répond aux principes suivants :
    • les entités commerciales qui les parrainent, telles que les laboratoires pharmaceutiques ou les entreprises du secteur des dispositifs et appareils médicaux, n’influencent ni le contenu, ni la présentation, ni le choix des intervenants ni la publication des résultats ;
    • les fonds engagés pour la conférence sont acceptés uniquement en tant que contribution aux frais généraux de la manifestation ;
    • l’indépendance des contenus de la conférence est garantie.

Cadeaux

  1. Afin de préserver le lien de confiance qui unit les patients et les médecins, ces derniers devraient décliner :
    • tout paiement en numéraire ou équivalent, ainsi que tout cadeau ou avantage personnel provenant d’une entité commerciale ;
    • les cadeaux visant à influencer la pratique clinique, y compris les incitations directes à la prescription.
  1. Les médecins pourraient accepter :
    • les cadeaux promotionnels si leur valeur est minime et si un tel cadeau n’est pas lié au fait que le médecin prescrive un certain médicament, utilise certains instruments ou matériaux ou adresse des patients à un certain établissement de santé ;
    • les cadeaux de courtoisie culturels, s’ils ne sont pas réguliers selon les normes locales, si leur valeur est minime et s’il n’a pas de lien avec la pratique de la médecine.

Recherche

  1. Un médecin peut effectuer des recherches financées par une entreprise commerciale, à titre individuel ou dans le cadre d’une institution, s’il se conforme aux principes énoncés ci-après :
    • Le médecin n’obéit qu’à la loi, aux principes et directives éthiques de la Déclaration d’Helsinki et au jugement clinique lorsqu’il mène des recherches. Il devrait se garder de toute pression extérieure concernant les résultats de ses recherches et ses publications.
    • Si possible, un médecin ou une organisation qui souhaite entreprendre des recherches, sollicite plusieurs entités commerciales pour les financer.
    • Les informations personnelles sur l’identité des patients impliqués dans les recherches ou des participants volontaires ne sont pas communiquées à l’entreprise partenaire sans le consentement des personnes concernées.
    • La rémunération versée au médecin pour sa recherche est basée sur le temps et les efforts qu’il y a consacrés. En aucun cas, cette somme ne saurait être liée aux résultats de la recherche.
    • Les résultats des recherches sont publiés en communiquant le nom de la société partenaire, accompagnés d’une mention indiquant qui est l’instigateur des recherches. Ce principe s’applique aussi bien à un subventionnement direct qu’indirect, total que partiel.
    • Les entités commerciales permettent la publication des résultats des recherches sans restriction.
    • Lorsque cela est possible, la recherche financée par les entreprises commerciales devrait être dirigée par des entités intermédiaires sans but lucratif, comme des instituts ou des fondations.

Affiliations à des entreprises commerciales

  1. Un médecin ne saurait s’affilier à une entité commerciale, par exemple en tant que consultant ou membre du comité scientifique sans que cette affiliation soit conforme aux principes énoncés ci-après :
    • L’affiliation ne porte pas atteinte à l’intégrité du médecin.
    • L’affiliation ne compromet pas les obligations du médecin vis-à-vis de ses patients.
    • L’affiliation, comme toute autre relation avec une entité commerciale est intégralement communiquée dans toutes les situations où cette information est utile, comme les conférences, les apparitions publiques, les articles, les comptes-rendus et les contributions susceptibles d’influencer les missions des associations médicales ou toute autre entité à but non lucratif.

Adoptée par la 60e Assemblée générale de l’AMM, New Delhi, Inde, Octobre 2009
et révisée par la 70e Assemblée Générale, Tbilissi, Géorgie, Octobre 2019

 

L’AMM réaffirme sa déclaration de Séoul sur l’autonomie professionnelle et l’indépendance clinique.

La profession médicale doit jouer un rôle central dans la régulation de la conduite et les activités professionnelles de ses membres et ainsi assurer que les pratiques professionnelles des médecins soient conformes à l’intérêt des citoyens.

La régulation de la profession médicale joue un rôle essentiel dans l’installation et le maintien de la confiance de la population dans les normes qui régissent les soins et la conduite qu’elle peut attendre des professionnels de la médecine. Cette régulation requiert une implication indépendante et très forte des professionnels.

Les médecins aspirent à la création ou au maintien de systèmes de régulation qui préserveront au mieux les normes les plus élevées en matière de soins pour tous les patients. Les médecins estiment que les modèles gérés par les médecins eux-mêmes peuvent fournir un environnement pour renforcera le droit du médecin de traiter ses patients sans interférence extérieure, sur la base de son seul jugement professionnel. Dans ces conditions, l’Association médicale mondiale demande à ses membres constituants et à tous les médecins de coopérer avec les organismes de régulation et de prendre les mesures qui s’imposent afin d’assurer que de tels systèmes efficaces soient en place. Ces mesures doivent être fondées sur les principes suivants :

  1. La société accorde aux médecins un degré élevé d’autonomie professionnelle et d’indépendance clinique, ce qui leur permet de faire des recommandations sur la base de leurs connaissances et de leur expérience, des données cliniques disponibles et de leur compréhension générale du patient, y compris de l’intérêt de ce dernier, sans influence extérieure inopportune ou abusive. Cet aspect est traité plus précisément dans la déclaration de Séoul de l’AMM.
  2. La régulation de la profession doit être proportionnée et doit avoir pour objectif de simplifier sans être pesante. Elle doit être fondée sur un modèle qui s’applique également à tous les médecins, qui protège les patients et qui se fonde sur un code d’éthique. La planification et la prestation de tous types de soins de santé sont fondées sur un modèle éthique et les connaissances médicales actuelles, qui régissent la pratique de tous les médecins. Ce modèle est un composant essentiel du professionnalisme et protège les patients. Les médecins sont les mieux placés qualifiés pour juger des actions de leurs pairs qui vont à l’encontre de ces normes, en gardant à l’esprit les circonstances locales qui peuvent être pertinentes.
  3. Il incombe aux médecins de s’associer étroitement à la régulation de la profession ou de l’assurer eux-mêmes. Les médecins doivent en dernier ressort participer au contrôle et à l’autorité de décision, du fait de leur formation médicale, de leurs connaissances, de leur expérience et de leurs compétences. Dans les pays où la régulation de la profession est assurée par les médecins eux-mêmes, ces derniers doivent assurer qu’elle inspire confiance à leurs concitoyens. Dans les pays où la régulation est mixte, les médecins doivent s’efforcer d’assurer qu’elle permet de maintenir la confiance de la population dans la profession.
  4. Les médecins de tous les pays sont priés d’instaurer et de préserver un système proportionné, reconnu, juste, légitime, rigoureux et transparent de régulation assurée par la profession et d’y participer activement. Ces systèmes sont conçus pour équilibrer les droits des médecins à exercer leur jugement professionnel librement par des obligations de sagesse et de mesure.
  5. Les associations médicales nationales doivent s’efforcer de promouvoir et de soutenir la notion de régulation efficace et éclairée parmi leurs membres et auprès du grand public. Pour éviter tout conflit d’intérêts éventuel qui pourrait naître de leur double rôle de représentation et de régulation, les médecins doivent assurer la séparation des deux processus et accorder une attention rigoureuse à la mise en œuvre d’un système juste et transparent dont l’honnêteté et l’indépendance ne puissent être mises en doute par le grand public.
  6. Tout système de régulation assurée par la profession elle-même doit promouvoir et garantir:
    • la prestation de soins sûrs et de haute qualité aux patients, dispensés par du personnel compétent;
    • la compétence des médecins qui assurent ces soins;
    • le comportement professionnel de tous les médecins, y compris sur le plan éthique;
    • la protection de la société et des droits du patient;
    • la promotion de l’adhésion et de la confiance des patients, de leur famille et du grand public;
    • l’assurance qualité du système de régulation;
    • le maintien de la confiance des patients et de la société dans son ensemble;
    • l’élaboration de solutions aux éventuels conflits d’intérêts;
    • un engagement à assumer des responsabilités professionnelles élargies.
  7. Afin de toujours assurer que les patients reçoivent des soins de qualité, les médecins devraient participer activement au processus de formation professionnelle continue, y compris d’analyse de leur pratique afin d’actualiser et de tenir à jour leurs connaissances et leurs compétences cliniques. Il incombe à leurs employeurs et à leurs supérieurs d’assurer que les médecins répondent à ces exigences.
  8. La conduite professionnelle des médecins doit toujours demeurer dans les limites du code d’éthique régissant la pratique des médecins dans chaque pays. Les associations médicales nationales doivent promouvoir une conduite professionnelle et éthique des médecins dans l’intérêt des patients. Les violations des règles éthiques doivent être rapidement reconnues, signalées aux autorités compétentes et corrigées. Les médecins doivent intervenir en temps utile pour assurer que leurs confrères ayant commis une faute ne mettent pas en danger leurs patients ou leurs collègues et reçoivent une assistance appropriée via un programme axé sur la santé des médecins ou une formation adaptée qui permettra leur exercice dans de bonnes conditions.
  9. L’autorité de régulation devrait, une fois la procédure judiciaire ou quasi judiciaire arrivée à son terme et si le médecin est reconnu coupable, publier les conclusions du tribunal et les éventuelles mesures de réparation adoptées. Les enseignements tirés de ces affaires devraient, dans la mesure du possible, inspirer la formation médicale. Le processus de régulation devrait assurer que de tels enseignements s’intègrent de manière cohérente à la formation.
  10. Les associations médicales nationales sont appelées à s’entraider dans le but de résoudre les problèmes, relever les défis nouveaux et ceux en voie d’apparition, y compris les éventuelles menaces sur la régulation assurée par la profession. L’échange continu d’informations et d’expérience entre les associations médicales nationales est fondamental pour le bien des patients.
  11. Quelles que soient les dispositions juridiques et règlementaires au niveau national, tout jugement sur le comportement ou les performances professionnelles d’un médecin doit tenir compte de l’avis de ses pairs, qui par leur formation et leur expérience comprennent la complexité des problèmes médicaux qui se posent.
  12. Il doit exister un système efficace et responsable de régulation qui ne saurait être complaisant ou avoir pour but de protéger la profession. Les associations médicales nationales devraient aider leurs membres à comprendre que l’autorégulation assurée par la profession, dans les pays où un tel système existe, doit garantir la sécurité et les droits à la santé de la population, susciter l’adhésion et la confiance du public en général et préserver l’honneur de la profession elle-même.