Prise de position de l’AMM sur la santé et la sécurité au travail et dans l’environnement


Adoptée par la 67ème Assemblée Générale, Taipei, Taiwan, octobre 2016
et révisée par la 73ème Assemblée Générale de l’AMM, Berlin, Allemagne, octobre 2022

 

PRÉAMBULE

La sécurité et la santé du travail et de l’environnement font partie intégrante de la santé publique, et en particulier du système de soins de santé primaires, dans la mesure où il s’agit souvent du premier niveau de contact des personnes, des familles et de la population avec le système de santé, au plus près possible des lieux où les gens vivent et travaillent.

Les travailleurs représentent plus de la moitié de la population mondiale et forment l’ossature de nombreuses économies, mais beaucoup d’entre eux ne disposent pas d’un accès adéquat à des services de santé au travail et environnementale, ni ne travaillent dans un environnement sûr.

L’OIT définit le travail décent comme la possibilité d’exercer un travail productif et convenablement rémunéré dans des conditions de dignité, d’égalité et de sécurité sur le lieu de travail. Bien que le droit à un travail décent soit reconnu dans la Déclaration universelle des droits de l’homme, toutes les quinze secondes un travailleur meurt d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, ce qui représente une perte de 4 % du PIB mondial.

Le nombre d’accidents du travail ou de maladies professionnelles qui sont déclarés comme tels est toutefois extrêmement faible. On estime que moins de 1 % des maladies professionnelles sont signalées.

En outre, comme de nombreux travailleurs font face à une pression croissante pour remplir les exigences de leur vie professionnelle, beaucoup d’entre eux risquent de développer un fort stress lié au travail, souvent associé à l’inadéquation entre leur travail et leurs capacités, leurs ressources ou leurs besoins ou bien lorsque les connaissances ou les compétences d’un travailleur ou d’un groupe de travail ne correspondent pas aux attentes de la culture organisationnelle d’une entreprise. Un haut niveau de stress peut avoir des conséquences sur la santé : surmenage, dépression, anxiété, maladies cardiovasculaires, voire suicide.

Ces dernières années, et plus encore depuis la pandémie de Covid-19, le monde assiste à la numérisation croissante du travail, les technologies de l’information et de la communication permettant aux travailleurs de ne plus se rendre, à plein temps ou à temps partiel, dans les locaux de leur employeur. En dépit d’aspects positifs, un environnement de travail numérique n’est pas sans risque, car il isole les employés, notamment les personnes qui vivent seules et peut se traduire par des niveaux accrus de stress et d’anxiété. L’allongement des horaires de travail et de la disponibilité des employés, ainsi que la diminution des frontières entre vie personnelle et vie professionnelle, peuvent menacer l’équilibre entre travail et temps libre. Il convient de mettre en place un environnement de travail numérique sain pour assurer la santé et la sécurité des employés.

Les Objectifs de développement durable des Nations unies no 3, 5, 8 et 13 appellent à agir pour la promotion de la santé pour tous à tous les âges, l’égalité des sexes, le travail décent et la gestion des conséquences des changements climatiques. La santé et la sécurité du travail et environnementales répondent à l’objectif de préserver la santé physique, mentale et le bien-être social de tous les travailleurs, et contribueront à réduire la pauvreté, permettre un développement durable et sauver des millions de vies chaque année.

Les médecins ont un rôle crucial à jouer, qu’il s’agisse de prévention, de diagnostic, de traitement, de suivi, de compte-rendu et de protection contre les accidents du travail et les pathologies professionnelles. Les médecins devraient en outre plaider pour des environnements de travail égalitaires, décents et inclusifs pour tous, sans égard pour l’âge, le genre, l’origine ethnique, la nationalité, la religion, l’affiliation politique, la race, l’orientation sexuelle ou le handicap des travailleurs.

De nombreux gouvernements et organisations patronales et syndicales accordent une attention croissante à la prévention des maladies professionnelles. La prévention demeure toutefois à l’arrière des priorités, malgré l’ampleur et la gravité de l’épidémie de maladies professionnelles.

Les médecins et les associations médicales nationales peuvent contribuer à l’identification des problèmes, à la mise en place de systèmes de signalement nationaux et à l’élaboration de politiques adéquates en santé et sécurité professionnelles et environnementales.

Les conditions de travail insatisfaisantes et dangereuses jouent un rôle important dans la contractation de maladies professionnelles et la survenue d’accidents du travail, auxquels les travailleurs payent chaque année un lourd tribut.

 

RECOMMANDATIONS

  1. Les médecins devraient jouer un rôle central dans l’information de la main-d’œuvre sur les déterminants sociaux de la santé, afin que celle-ci soit à même de sensibiliser à ce sujet sur les lieux de travail.
  2. L’enseignement médical devrait accorder à la santé et la sécurité professionnelles et environnementales la place qu’elles méritent, à la fois dans l’internat et dans l’externat.
  3. Les médecins doivent coopérer avec les autorités sanitaires et sociales pour promouvoir la santé et la sécurité sur les lieux de travail.
  4. Tous les travailleurs devraient avoir accès à des services de santé et de sécurité au travail et environnementales basés sur les risques dès leur premier jour de travail et au-delà de leur dernier jour de travail, car certaines maladies professionnelles ont une longue période de latence. Le contenu de ces services devrait être harmonisé et le rôle des médecins dans la planification et la mise en œuvre de systèmes de santé et de sécurité professionnelles et environnementales, qui sont essentiellement préventifs/protecteurs, doit être reconnu.
  5. Les membres constituants de l’AMM devraient agir activement et encourager l’extension de la portée des services de sécurité et de santé professionnelles et environnementales, prévenir et réduire les maladies, les accidents et les troubles de la santé reproductive professionnels et protéger l’environnement. Ils devraient aussi promouvoir l’égalité entre les sexes sur le lieu de travail et encourager l’amélioration des systèmes de consignation et de signalement des données de santé et de sécurité professionnelle et environnementale. Ils devraient en outre mettre l’accent sur le renforcement des compétences, l’enseignement, la formation et la recherche collaborative de la main-d’œuvre.
  6. Les membres constituants de l’AMM, avec les gouvernements, devraient jouer un rôle actif, le cas échéant, dans la formulation et la création de systèmes nationaux facilitant la prévention en matière de santé et de sécurité professionnelle et environnementale, ainsi que la consignation et le signalement des accidents et maladies professionnelles dans leurs pays respectifs.
  7. Les médecins chargés d’évaluer l’indemnisation des travailleurs devraient être expérimentés dans le domaine de la médecine du travail et de la médecine environnementale. Lorsqu’un lien de causalité est établi entre une exposition professionnelle ou environnementale et un diagnostic est établi, le médecin doit le signaler par un système de déclaration approprié.
  8. Les maladies et accidents professionnels sont souvent traités dans le contexte des assurances et des indemnisations. En l’absence de tels mécanismes, les membres constituants de l’AMM devraient plaider pour la protection des travailleurs via des mécanismes d’assurance ou de sécurité sociale.
  9. Dans le cadre des services fournis à un employeur, les médecins devraient plaider pour que ceux-ci remplissent les conditions minimales énoncées dans les normes professionnelles de l’OIT, notamment lorsque de telles conditions ne figurent pas dans la législation nationale.
  10. Les employeurs devraient assurer un environnement de travail sûr, reconnaître les conséquences de mauvaises conditions de travail sur les personnes et sur la société et y remédier.
  11. Les employeurs devraient envisager de promouvoir et de proposer les vaccins essentiels à leurs employés.
  12. Les membres constituants de l’AMM devraient envisager de créer une instance interne chargée des problèmes des médecins exerçant dans le domaine de la santé professionnelle et environnementale et les encourager à contribuer aux études scientifiques sur ce sujet.
  13. Les gouvernements devraient collaborer à la création d’un système international d’évaluation des risques professionnels et élaborer des stratégies pour protéger la santé des travailleurs.
  14. Les gouvernements devraient établir des cadres législatifs protégeant les droits et la santé des travailleurs, y compris les conséquences sur la santé et la santé reproductive du travail à domicile.
  15. Les gouvernements et les associations médicales nationales doivent promouvoir auprès de leurs membres la conception de programmes de formation, d’information et de recherche en santé au travail.

 

Statement
OEHS, OIT, Santé des travailleurs, Santé environnementale, Santé et sécurité au travail, Santé et sécurité au travail et dans l’environnement, Sécurité sociale, Soins de santé primaires

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