Prise de Position de l’AMM sur l’immunisation


Adoptée par la 63ème Assemblée Générale de l’AMM, Bangkok, Thaïlande, octobre 2012
et réaffirmée par la 212ème session du Conseil de l’AMM, Santiago, Chili, avril 2019

 

PREAMBULE

L’utilisation de la vaccination afin de prévenir une maladie remonte à 1796 lorsque Jenner utilisa avec succès la vache pour vacciner contre la variole. Depuis, la vaccination et l’immunisation ont été reconnues  comme une stratégie efficace de prévention de plusieurs maladies transmissibles et sont à présent développées pour lutter contre certaines maladies non transmissibles.

Le développement de la vaccination et sa mise en œuvre constituent quelques unes des mesures les plus importantes des temps modernes pour la santé mondiale. On estime que l’immunisation évite actuellement environ 2,5 millions de morts par an en protégeant contre des maladies telles que la diphtérie, le tétanos, la coqueluche et la rougeole. Environ 109 millions d’enfants de moins d’un an sont totalement protégés par un seul vaccin contre la diphtérie-tétanos-coqueluche (DTP3).

La plupart du temps, le but ultime de l’immunisation est l’éradication totale d’une maladie transmissible. Tel fut le cas en 1980 pour la variole et on peut raisonnablement envisager l’éradication de la polio dans les prochaines années.

La ‘vaccination dans le monde: vision et stratégie (GIVS) 2006-2015′ était une stratégie élaborée par l’OMS et l’UNICEF dans l’espoir d’atteindre les populations cibles qui actuellement n’ont pas de services d’immunisation ou un niveau de couverture adéquat.

Les quatre stratégies promues dans cette vision sont les suivantes :

  • Protéger davantage d’individus dans un monde en mutation
  • Introduire de nouveaux vaccins et des technologies
  • Intégrer l’immunisation, d’autres interventions sanitaires apparentées et une surveillance dans les systèmes de soins
  • Immuniser dans le contexte de l’interdépendance mondiale [1]

La recherche sur les vaccins met constamment à jour de nouvelles possibilités pour protéger les populations contre les graves menaces sanitaires. De plus, de nouvelles souches de maladie font leur apparition, ce qui nécessite l’adaptation des vaccins afin d’assurer la protection.

Le processus d’immunisation requiert un environnement bénéficiant de ressources et de personnels de santé appropriés afin de garantir une vaccination efficace et sûre. Souvent la vaccination demande des injections et il faut toujours respecter des procédures sûres pour ces injections.

Les calendriers d’immunisation peuvent varier en fonction du vaccin, certains demandant plusieurs injections pour être efficaces. Il est capital que le calendrier soit suivi dans son intégralité, afin de ne pas compromettre l’efficacité du vaccin.

Les bénéfices de l’immunisation ont eu un impact majeur sur les populations, non seulement en termes de prévention d’une mauvaise santé mais aussi en permettant les ressources précédemment mobilisées pour soigner les maladies, d’être redirigées sur d’autres priorités sanitaires. Des populations en meilleure santé sont économiquement profitables aux pays et peuvent davantage apporter à la société.

Réduire la mortalité de l’enfant est le quatrième des Objectifs du millénaire pour le développement, l’immunisation des enfants ayant un impact majeur sur le taux de mortalité des enfants de moins de 5 ans. Selon l’OMS, plus de 19 millions d’enfants n’ont pas reçu le vaccin DTP3. De plus, il convient de mettre en place des services de santé de base pour la santé maternelle avec du personnel de santé qualifié.

L’immunisation des adultes face à des maladies telles que la grippe et les infections à pneumocoque a prouvé son efficacité, non seulement en diminuant le nombre de cas parmi ceux ayant été immunisés mais aussi en réduisant le fléau des maladies dans la société.

La profession médicale dénonce toute prise de position non fondée et inexacte sur les possibles dangers de la vaccination. De telles prises de position ont fait baisser le taux d’immunisation dans certains pays. Il en est résulte une augmentation du taux de maladies à prévenir avec de graves conséquences pour un certain nombre de personnes.

Les pays n’ont pas tous  les mêmes priorités en termes d’immunisation, la prévalence et le risque de maladies variant entre les populations. Tous les pays n’ont pas le même taux de couverture ni les mêmes ressources pour acquérir, coordonner, distribuer ou bien administrer efficacement les vaccins à leurs populations, comptant souvent sur les organisations non gouvernementales pour soutenir les programmes d’immunisation. Ces dernières à leur tour s’appuient souvent sur des fonds extérieurs qui ne sont pas toujours sûrs. Dans cette période de crise financière mondiale, le financement de tels programmes est soumis à des pressions considérables.

Le risque de complications provoquées par des maladies évitables par la vaccination est maximum chez ceux confrontés à des obstacles pour accéder aux services d’immunisation. Ces obstacles peuvent être le facteur coûts, la localisation, la méconnaissance des services d’immunisation et de leurs bénéfices pour la santé ou bien d’autres facteurs restrictifs.

Les individus souffrant de maladies chroniques, ou ayant des problèmes de santé ou d’autres facteurs de risques, tel que l’âge, sont particulièrement exposés à de graves complications face à des maladies que l’on peut prévenir par la vaccination. Ils devraient donc être ciblés pour assurer une immunisation adéquate.

Les chaînes d’approvisionnement peuvent s’avérer difficiles à sécuriser, notamment dans des pays manquant de coordination ou de soutien au niveau de leurs programmes d’immunisation. Sécuriser les ressources appropriées par exemple avec des professionnels de santé qualifiés, des équipements et un soutien administratif peut être un défi majeur.

La collecte des données sur le taux d’administration de vaccination, sur les effets secondaires des vaccins et la surveillance des maladies sont souvent  difficiles à effectuer, particulièrement dans les zones isolées et en manque de ressources. Néanmoins, signaler les incidents et contrôler la propagation des maladies sont des outils essentiels pour lutter contre les menaces sanitaires mondiales.

 

RECOMMANDATIONS

L’AMM soutient les recommandations de Vaccination dans le monde : vision et stratégie (GIVS) 2006-2015 et lance un appel à la communauté internationale pour :

  • Encourager les gouvernements à allouer des ressources aux programmes d’immunisation visant à répondre aux besoins spécifiques de leurs pays.
  • Reconnaître l’importance de la vaccination/immunisation en soutenant et en adoptant toujours les mesures visant à atteindre des objectifs de vaccination au niveau mondial et à satisfaire aux Objectifs du millénaire pour le développement, notamment le quatrième (réduire la mortalité infantile), le cinquième (améliorer la santé maternelle) et le sixième (lutter contre le VIH/SIDA, la malaria et d’autres maladies).
  • Reconnaître la responsabilité mondiale de l’immunisation face aux maladies que l’on peut éviter et soutenir le travail dans les pays ayant des difficultés à atteindre les objectifs 2012 de l’Initiative Mondiale d’éradication de la polio [2].
  • Soutenir les gouvernements nationaux ayant des populations vulnérables  courant le risque de maladies qui peuvent être prévenues par la vaccination ainsi que les agences locales œuvrant à fournir des services d’immunisation et travailler avec elles pour lever les obstacles empêchant l’accès aux services.
  • Soutenir  la recherche sur les vaccins et leur mise au point et s’impliquer via un financement adéquat dans la recherche sur les vaccins.
  • Promouvoir la vaccination et les bénéfices de l’immunisation, notamment en ciblant les populations à risques et celles qui sont difficiles d’accès.
  • Adhérer aux actions de suivi entreprises par l’OMS et d’autres autorités sanitaires.
  • Promouvoir de hautes normes dans la recherche, le développement et l’administration des vaccins afin de garantir la sécurité des patients. Les vaccins doivent être soigneusement testés avant leur mise en œuvre à grande échelle et contrôlés ensuite afin de prévenir de possibles complications et des effets secondaires indésirables. Pour leur succès, les programmes d’immunisation doivent recueillir la confiance du public, ce qui dépend de la sécurité qui y est rattachée.

Dans le cadre de la délivrance de programmes de vaccination, l’AMM recommande :

  • Un respect du calendrier complet d’immunisation pour garantir une couverture maximale. Une gestion et un suivi du  calendrier si possible par des personnes dûment formées afin d’assurer un service intégral et une prise en charge rapide et appropriée des effets secondaires des vaccins.
  • Le recours à des stratégies pour atteindre des populations pouvant être isolées, pour des raisons liées à leur localisation, leur race, leur religion, leur statut économique, leur marginalisation sociale, leur sexe et/ou leur âge.
  • S’assurer que des professionnels de santé qualifiés aient une formation complète pour assurer des vaccinations et immunisations sûres, et que ces dernières ciblent ceux en ayant le plus besoin.
  • L’éducation de la population sur les bénéfices de l’immunisation et sur la manière d’accéder à de tels services.
  • La tenue de dossiers médicaux bien à jour afin que les données pertinentes sur l’administration des vaccins et le taux de couverture soient disponibles, permettant ainsi aux politiques d’immunisation de s’appuyer sur des preuves véritables et fiables.
  • Les professionnels de santé devraient être considérés comme une population prioritaire pour bénéficier d’une immunisation compte tenu de leur exposition aux patients et aux maladies.

L’AMM appelle ses membres à agir sur les points suivants :

  • Sensibiliser davantage les populations aux calendriers nationaux d’immunisation ainsi qu’à leurs antécédents personnels (et ceux de leurs dépendants) en matière d’immunisation.
  • Travailler avec les gouvernements nationaux et locaux chargés d’alimenter et d’appliquer les programmes d’immunisation.
  • Veiller à ce que le personnel de santé chargé de vacciner et d’immuniser reçoive une formation théorique et pratique adéquate.
  • Promouvoir l’efficacité basée sur la preuve de la vaccination et sensibiliser davantage sur les bénéfices de l’immunisation aussi bien les médecins que le public.

 

Références

[1] World Health Organization and United Nations Children’s Fund. Global Immunisation Vision and Strategy, 2006-2015. Geneva, Switzerland: World Health Organization and United Nations Children’s Fund; 2005. Disponible à l’adresse: http://www.who.int/immunisation/givs/related_docs/en/index.html

[2] World Health Organization. Global Polio Eradication Initiative: Strategic Plan 2010-2012. Geneva, Switzerland: World Health Organization; 2010. Disponible à l’adresse: http://polioeradication.org/who-we-are/strategy/

Prise de position
Immunisation, Santé publique