Prise de Position de l’AMM sur les orientations naturelles de la sexualité humaine


Adoptée par la 64ème Assemblée Générale de l’AMM, Fortaleza, Brésil, Octobre 2013, et
révisée par la 74ème Assemblée générale de l’AMM, Kigali, Rwanda, Octobre 2023

 

PRÉAMBULE

Les personnes qui s’identifient comme LGBTQIA+ (lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres, queers, asexuelles et autres) représentent un spectre large et fluide d’orientations sexuelles, d’identités de genre, d’expressions de genre ou de caractéristiques sexuelles naturelles. Bien que les personnes LGBTQIA+ peuvent partagent des expériences culturelles et sociales communes et des objectifs communs de justice et d’équité face aux traitements discriminatoires, préjudiciables, voire à la violence, il s’agit de communautés diverses confrontées à des enjeux distincts et ayant des besoins spécifiques en matière de soins de santé et au-delà.

La présente prise de position porte spécifiquement sur les personnes lesbiennes, gays et bisexuelles.

Dans le cadre de leur travail, les professionnels de santé rencontrent de nombreux aspects de la diversité humaine, y compris les différentes orientations naturelles de la sexualité humaine.

Un important corpus de la recherche scientifique montre que le fait d’être lesbienne, gay ou bisexuel s’inscrit dans les orientations naturelles de la sexualité humaine et n’a en soi aucun effet néfaste sur la santé. Ils ne constituent pas un trouble ou une maladie qui requerrait un traitement ou une guérison et tout effort en ce sens serait contraire à une pratique éthique de la médecine.

Par conséquent, l’homosexualité et la bisexualité ne figurent pas dans la classification internationale des maladies (CIM) de l’OMS.

Il n’en demeure pas moins que la discrimination, directe ou indirecte, sur le plan interpersonnel comme institutionnel, les législations réprimant l’homosexualité ou la bisexualité, les violations des droits humains, la stigmatisation, la pénalisation des relations intimes entre personnes de même sexe, le rejet par les pairs et l’intimidation continuent d’avoir de graves conséquences sur la santé psychologique et physique des lesbiennes, des gays et des personnes bisexuelles. Ces atteintes se perpétuent en raison du manque d’éducation sur les différentes orientations naturelles de la sexualité humaine dans la société. Elles conduisent à une moins bonne santé, qui se traduit par une prévalence accrue de dépression, d’anxiété, de consommation de stupéfiants, d’idées suicidaires et de tentatives de suicide. Ainsi, les taux de suicide chez les adolescents et les jeunes adultes bisexuels, lesbiennes et gays sont considérablement plus élevés que chez les adolescents et jeunes adultes hétérosexuels.

Ces effets délétères sur l’état de santé peuvent être aggravés par d’autres facteurs intersectionnels, parmi lesquels l’origine nationale ou ethnique, le sexe, l’âge, la religion, l’identité de genre, la classe sociale ou le handicap.

La pathologisation erronée et sans fondement des identités lesbienne, gay et bisexuelle fait courir aux personnes concernées le risque d’être soumises à des procédures dites « de conversion » ou « réparatrices », ou encore « pratiques de réorientation sexuelle et de genre (PRSG) », qui ne sont que des pratiques dangereuses et contraires à l’éthique visant à effacer ou modifier l’orientation sexuelle naturelle ou l’identité de genre d’une personne. Ces méthodes sont dépourvues de base médicale, ne reposent sur aucune preuve d’efficacité et constituent une grave menace pour la santé et les droits fondamentaux des personnes qui y sont soumises. Elles peuvent générer de l’anxiété, une faible estime de soi, conduire à la dépression, à la consommation de stupéfiants, à des difficultés sur le plan de l’intimité, voire au suicide.

Des expériences négatives dans le cadre de soins de santé peuvent nuire à la relation entre médecin et patient et conduire les lesbiennes, les gays et les personnes bisexuelles à ne pas recourir à des soins pourtant disponibles. Ces personnes peuvent aussi cacher leur orientation sexuelle à leur médecin, de crainte de ne pas recevoir le traitement adéquat, ou de ne pouvoir compter sur un environnement de soins sûr et respectueux de leur vie privée. Or sans cette information, il peut se révéler plus difficile pour les médecins d’offrir des soins ciblés qui tiennent compte des besoins de santé spécifiques des patients gays, lesbiennes ou bisexuels.

Les médecins, les étudiants en médecine et les autres professionnels de santé gays, lesbiennes ou bisexuels sont également confrontés à la discrimination, à la marginalisation et à l’intimidation ou peuvent être désavantagés, sur leur lieu de travail, dans les facultés, les organisations professionnelles et ailleurs. Les environnements de travail et d’enseignement nocifs peuvent générer du stress et conduire au burn-out, notamment chez les personnes marginalisées.

 

RECOMMANDATIONS

  1. L’AMM affirme fermement que le fait d’être lesbienne, gay ou bisexuel ne constitue pas une maladie, mais une orientation naturelle de la sexualité humaine.
  2. L’AMM condamne toute forme de stigmatisation, de criminalisation et de discrimination à l’encontre de personnes sur la base de leur orientation sexuelle.
  3. L’AMM affirme que tout soutien psychiatrique ou psychologique qui serait nécessaire ne doit pas porter sur l’orientation sexuelle elle-même, mais sur les conflits entre cette orientation et les normes et préjugés religieux et sociaux intériorisés ainsi que sur les besoins de santé de chaque patient.
  4. L’AMM condamne sans ambiguïté les méthodes dites « de conversion » ou « réparatrices », lesquelles constituent une violation des droits humains et des pratiques injustifiables, qui doivent être dénoncées et sanctionnées. Il est contraire à l’éthique qu’un médecin prenne part à de tels protocoles, à quelque étape que ce soit.
  1. L’AMM appelle tous les médecins :
    • à classer les maladies physiques et psychologiques sur la base de symptômes cliniques pertinents selon les critères de la CIM-11, sans égard pour l’orientation sexuelle et à proposer des traitements et protocoles de qualité, fondés sur des preuves et reconnus au niveau international, dans le respect des principes énoncés dans le Code international d’éthique médicale de l’AMM ;
    • à offrir un environnement de soins sûr, respectueux et inclusif pour les patients gays, lesbiennes et bisexuels ;
    • à favoriser un environnement de travail et d’apprentissage sûr, respectueux et inclusif pour les médecins, les étudiants en médecine et les autres professionnels de santé ;
    • à recourir à la formation continue et au perfectionnement professionnel pour mieux comprendre les besoins de santé spécifiques des patients gays, lesbiennes et bisexuels et les bénéfices que ces derniers peuvent attendre de certains traitements ;
    • lorsque cela est opportun, à associer le partenaire de même sexe ou les parents de même sexe de leur patient aux discussions relatives aux préférences de leur patient dans le respect du consentement et de la vie privée de celui-ci ;
    • à dénoncer les législations et les pratiques qui portent atteinte aux droits fondamentaux des lesbiennes, des gays et des bisexuels, lesquelles peuvent également avoir des conséquences néfastes sur l’ensemble du système de santé ;
    • à rejeter et à refuser de participer, dans quelque mesure que ce soit, à des méthodes dites de « conversion » ou « réparatrices ».
  1. L’AMM appelle ses membres constituants et les associations professionnelles :
    • à plaider pour un environnement de travail et d’apprentissage sûr, respectueux et inclusif pour les médecins, les étudiants en médecine et les autres professionnels de santé ;
    • à instaurer et à appliquer des politiques de lutte contre la discrimination conformes à la prise de position de l’AMM sur la non-discrimination vis-à-vis des médecins en matière d’affiliation et d’activités professionnelles ;
    • à créer des directives à l’attention des médecins expliquant les difficultés spécifiques des patientes lesbiennes et des patients gays et bisexuels en matière de santé physique et mentale le cas échéant ;
    • à promouvoir dans la mesure du possible une évolution de l’enseignement de la médecine, de la formation en spécialité et du cursus de formation continue/perfectionnement pour que ces cursus informent et sensibilisent aux besoins de santé spécifiques des lesbiennes, des gays et des bisexuels ;
    • à créer des canaux permettant aux médecins lesbiennes, gays ou bisexuels de signaler les actes de discrimination ou les biais qui leur font du tort, à eux ou à des patients gays, lesbiennes ou bisexuels ;
    • dans les environnements où sont garanties la confidentialité et la sécurité du patient et où les données ne peuvent être utilisées à des fins étrangères au service, à encourager le recueil volontaire de données pour connaître et rendre compte des résultats cliniques des groupes de patients gays, lesbiennes et bisexuels, en prenant en compte l’intersectionnalité afin d’assurer et d’améliorer la prestation de soins à ces groupes ;
    • à condamner activement les méthodes dites « de conversion » ou « réparatrices ».
  1. L’AMM appelle les gouvernements :
    • à rejeter et à abroger les législations portant atteinte aux droits des lesbiennes, des gays et des bisexuels ;
    • à condamner et à interdire les méthodes dites « de conversion » ou « réparatrices » ;
    • à promouvoir des politiques visant à corriger toutes les iniquités, de santé et autres, causées par toute discrimination ouverte ou implicite contre les personnes lesbiennes, gays ou bisexuelles ;
    • à encourager l’éducation aux différentes orientations naturelles de la sexualité humaine dès le plus jeune âge afin d’en favoriser l’acceptation pour parvenir à une meilleure santé physique et mentale de toutes et tous.

 

 

Prise de position
Bisexuel, Discrimination, Discrimination, Droits humains, Homosexualité, Orientation sexuelle, Sexualité Humaine, Stigmatisation, Stigmatisation, Thérapie de conversion/réparatrices

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