Prise de Position de l’AMM sur les Médecins et la Santé Publique


Adoptée par la 47e Assemblée générale de l’AMM, Bali, Indonésie, Septembre 1995 et
révisée par la 57e Assemblée Générale, Pilanesberg, Afrique du Sud, Octobre 2006
et par la 67e Assemblée Générale, Taipei, Taiwan, Octobre 2016

La santé d’une communauté ou d’une population se définit par plusieurs facteurs qui vont au-delà des causes traditionnellement comprises de la maladie. Les déterminants sociaux de la santé  comportent des facteurs qui touchent aux choix de mode de vie, aux facteurs qui affectent l’environnement physique, psychosocial et environnemental dans lequel vivent les individus et aux facteurs qui affectent les services de santé mis à la disposition des personnes. La santé publique implique le contrôle, l’évaluation et la planification d’un ensemble de programmes et d’activités ciblés sur les besoins identifiés de la population. Le secteur public devrait  pouvoir accomplir ce rôle efficacement afin d’optimiser la santé collective. Une composante clé de la politique de santé publique devrait être l’intégration et l’égalité en matière de santé, les agences de santé publique doivent être particulièrement attentives aux populations et communautés dont les conditions sociales, économiques et politiques leur font courir davantage de risques sanitaires qu’à la population en général.

Les médecins et leurs associations professionnelles ont une responsabilité éthique et professionnelle de toujours agir dans le plus grand intérêt des patients. Cela implique de collaborer avec les agences de santé publique pour intégrer les soins médicaux des patients individuels en promouvant plus largement la santé du public.

Les fonctions clés des agences de santé publique sont les suivantes :

Promotion de la santé :

  • Travailler avec les prestataires de santé afin d’informer le public en général et lui permettre de participer activement à la prévention et au contrôle des maladies, en adoptant des modes de vie sains et en utilisant les services médicaux de manière adéquate;
  • Veiller à ce que les conditions contribuant à une bonne santé, entre autres des services médicaux de grande qualité, un approvisionnement en eau potable, une bonne alimentation, une atmosphère non polluée tout comme des possibilités d’activités physiques et récréatives, soient disponibles pour toute la population ;
  • Travailler avec les autorités publiques responsables pour créer une politique publique saine et un contexte favorable à des choix de vie sains et développer un capital humain et social.

Prévention :    garantir un accès au dépistage, aux autres services de prévention et aux soins pour toute la population.

Protection : contrôler et protéger la santé des communautés contre les maladies transmissibles et l’exposition aux polluants toxiques, les risques professionnels, les produits nocifs et les services de santé de mauvaise qualité. Il faut pour cela fixer des priorités, établir des programmes de première nécessité, se procurer les ressources nécessaires et garantir l’existence des services de laboratoires de santé publique nécessaires.

Surveillance: identifier l’apparition de maladies infectieuses et les caractéristiques des maladies chroniques, établir des programmes de prévention ou de contrôle appropriés;

Evaluation de la santé de la population : évaluer les besoins sanitaires de la population, organiser les ressources disponibles pour répondre à ces besoins et élaborer une politique sanitaire en réponse aux besoins des communautés et de la nation.

Les programmes et actions spécifiques menés dans chaque juridiction (locale ou nationale) dépendront des problèmes et des besoins identifiés, de l’organisation du système de santé, de la nature et des objectifs, des différents partenariats mis en place et des ressources disponibles pour répondre aux besoins identifiés.

Les agences de santé publique bénéficient largement du soutien et de l’étroite collaboration des médecins et de leurs associations professionnelles. La santé d’une communauté ou d’une nation se mesure à la santé de tous ses citoyens. Les problèmes de santé qui touchent une personne et que l’on peut éviter affectent la santé et les ressources de l’ensemble de la communauté. L’efficacité de nombreux programmes de santé publique dépend donc de la collaboration active des médecins et de leurs associations professionnelles avec les agences de santé publique et les autres agences gouvernementales ou non gouvernementales.

Le secteur médical et le secteur de la santé publique devraient collaborer efficacement sur la diffusion des informations de santé publique et des programmes éducatifs qui assurent la promotion de modes de vie sains et réduisent les risques sanitaires y compris ceux liés au tabac, à l’alcool et aux autres drogues, à une vie sexuelle augmentant les risques de transmission du VIH et des maladies sexuellement transmissibles, à une mauvaise diététique et à l’absence d’activités physiques, à une immunisation incorrecte pendant l’enfance. Par exemple, l’éducation en matière de santé peut grandement réduire la morbidité et la mortalité infantiles (entre autres en encourageant l’allaitement maternel et en éduquant les parents sur la diététique, le tout avec une assistance au travail et au sein de  la communauté).

Les agences de santé publique sont officiellement avant tout chargées de la surveillance des   maladies, de l’investigation et du contrôle. Ces activités ne peuvent pas être menées à bien sans la coopération et le soutien actifs  des médecins au niveau communautaire. Ces derniers connaissent la typologie des maladies individuelles et communautaires et peuvent donc avertir rapidement les autorités sanitaires des problèmes nécessitant de plus amples recherches ou des décisions. Par exemple, les médecins peuvent aider à identifier les populations à hauts risques dans les cas de maladies comme la tuberculose et signaler les cas de maladies contagieuses comme la rougeole, la coqueluche ou certaines causes infectieuses de diarrhées tout comme les expositions au plomb ou à d’autres produits chimiques et substances toxiques au sein de la communauté ou sur le lieu de travail. Une collaboration étroite  entre les agences de santé publique et les médecins ainsi qu’avec les autres professionnels de santé est indispensable pour un suivi efficace des maladies.

Indépendamment de l’efficacité des programmes de santé publique existants dans une juridiction, les associations médicales professionnelles devraient être conscientes des besoins sanitaires non satisfaits dans leurs communautés et les nations devraient prôner des actions, des programmes et des ressources pour répondre à ces besoins. Ces efforts pourraient porter sur des domaines tels que l’éducation publique pour la promotion de la santé et la prévention des maladies, la gestion et le contrôle des dangers liés à l’environnement, l’identification et l’information sur les effets néfastes pour la santé des problèmes sociaux tels que la violence interpersonnelle ou les pratiques sociales nuisibles, l’identification et la promotion des services permettant d’améliorer la préparation aux traitements d’urgence.

Dans les juridictions où les services de santé de base sont insuffisants, les associations médicales doivent travailler avec les autres agences et groupes de santé afin d’établir des priorités de défense et d’action. Par exemple, dans un pays ou une région aux ressources limitées n’offrant ni eau potable ni réseau d’assainissement à la plupart de ses habitants, ces besoins devront être prioritaires sur les technologies médicales qui ne profiteraient qu’à une petite partie de la population.

Certains problèmes de santé sont extrêmement complexes et comportent des réponses à plusieurs niveaux. Par exemple, les personnes ayant un taux élevé de plomb dans le sang nécessitent certes un traitement médical approprié mais il faut aussi déterminer la source de la contamination et prendre des mesures pour  éliminer le danger. Parfois, les politiques favorisant la santé publique inquiètent en raison de leur impact possible sur le plan économique. Par exemple, les vives réactions face à l’impact économique potentiel des politiques anti- tabac peuvent provenir de régions ou de groupes qui tirent d’importants revenus de la culture ou de la transformation du tabac Cependant, les préoccupations économiques ne doivent pas entraver un programme vigoureux de défense de la santé publique combattant la consommation du tabac. La promotion du tabac sous toutes ses formes devrait faire l’objet d’une opposition vigoureuse. Tous les efforts devraient être entrepris  pour réduire la consommation du tabac dans les pays développés et les pays en voie de développement.

Les médecins et leurs associations devraient collaborer avec les autorités politiques et les autres organisations pour encourager les média à envoyer des messages positifs pour l’éducation sanitaire ayant trait à la diététique, à la consommation de drogues, aux maladies sexuellement transmissibles, aux risques cardiovasculaires etc.

Les associations médicales devraient demander à leurs membres de bien informer les patients de l’existence de services de santé publique.

Prise de position
Environnement, Santé publique