Prise de position de l’AMM sur la prévention de la pollution de l’air due aux émissions des véhicules


Adoptées par la 10ème Assemblée Médicale Mondiale, Durban, Afrique du Sud, octobre 2014

PREAMBULE

Il existe un certain nombre de moyens permettant de réduire le volume d’émissions nuisibles. Cela inclut d’encourager une diminution des trajets routiers, le transport actif (à pieds ou à vélo) pour les personnes entreprenant des trajets relativement courts, l’utilisation de transport public par préférence aux véhicules individuels, et des sources alternatives d’énergie pour les véhicules, y compris les technologies électriques et hybrides. Lorsque l’utilisation du véhicule est essentielle, des moyens de réduire leurs émissions nuisibles devraient être privilégiés.

Les médecins dans le monde sont conscients de la pollution de l’air. Cette dernière nuit à  la qualité de vie de centaines de millions de personnes  et crée  un lourd fardeau de maladies ainsi que des pertes économiques et des coûts  de santé. Selon les données de l’OMS, en 2012, la pollution urbaine liée à l’air extérieur a causé3,7 millions de décès par an soit 6,7% du nombre total de décès (OMS, 2014).

En particulier, il a été prouvé que les particules de suie diesel notamment étaient carcinogènes (IARC, 07/2012). De plus elles ont de nombreux effets toxiques, en particulier au niveau du système cardio-vasculaire (Brook et al. 2010) et respiratoire (ERS, 2010). De plus, dans le contexte du réchauffement mondial, les suies associées au méthane sont considérées comme la deuxième substance majeure à effet de serre après le CO2 (Kerr, 2013).

Même si les nouveaux véhicules devront se  conformer à des  normes d’émission plus strictes prenant en compte également les particules ultrafines les plus nocives,   une flotte de véhicules très polluants en circulation dont des véhicules tout terrain, des engins de construction et des  navires continuera à polluer pendant encore de nombreuses années.

CONTEXTE

Dans les villes très peuplées, les concentrations en fines poussières mesurables en tant qu’aérosols  sont 50 fois plus importantes que le niveau maximum recommandé par l’OMS. Des moyens de  transports importants, l’électricité provenant du charbon et la pollution provoquée par les engins de construction sont autant de facteurs aggravants.  Les personnes vivant et travaillant à proximité de grandes artères (circulation très dense) sont les plus touchées par les polluants.

Pour lutter contre les risques sanitaires ci-dessus mentionnés, il existe une série de systèmes de filtres fiables et très efficaces sur le marché (filtres de la meilleure technique disponible (MTD)[1]). Ils s’appliquent à tous les moteurs de combustion interne et ils réduisent par plus de 100 même les particules ultrafines les plus nocives.

Dès que 90% des véhicules  poids lourds, aussi bien les véhicules neufs que les véhicules mis aux normes,   satisferont à cette norme, les problèmes de santé liés aux émissions des poids lourds diminueront  grandement  et aucun autre renforcement des normes d’émission ne sera possible ou même pas du tout nécessaire car le polluant aura  presque totalement été éliminé.

Dans divers pays sur des continents différents et dans des conditions variables, les programmes de mise en conformité ou de mise à niveau ont bien fonctionné. Le Groupe de travail des NU sur la prévention de la pollution et l’énergie à Genève vient de proposer une norme technique de réglementation dans les Etats membres qui sera applicable dans le monde entier.

L’AMM soutient ces efforts et demande aux décideurs politiques dans tous les pays, notamment dans les régions urbaines, de réglementer l’accès des véhicules sans filtre et/ou de fournir une aide financière afin de favoriser la mise en conformité des véhicules en circulation.

RECOMMANDATIONS

L’AMM recommande donc que toutes les AMN encouragent leurs gouvernements respectifs à :

  1. Instaurer des normes MTD pour tous les nouveaux véhicules diesels (sur route et tout terrain);
  2. Inciter la mise en conformité avec des filtres MTD pour tous les moteurs en circulation;
  3. Contrôler et baisser la concentration de nano particules de suie dans l’air respiré en ville;
  4. Mener des études épidémiologiques pour détecter et différencier les effets sur la santé des particules ultrafines;
  5. Sensibiliser les professionnels et le public à l’importance de la suie diesel et aux méthodes actuelles d’élimination des particules
  6. Contribuer à la mise en place de stratégies pour protéger la population des particules de suie dans l’habitacle des avions, dans les trains, dans les maisons et dans l’environnement en général. Ces stratégies devraient inclure des plans de développement et d’accroissement des moyens de transport publics.

Abréviations :

  • CEE-ONU: Commission économique pour l’Europe des Nations unies
  • GRPE: Groupe de travail sur la prévention de la pollution et l’énergie
  • EPA: Environmental Protection Agency (US)
  • ERS: European Respiratory Society
  • CIRC: Centre international de recherche sur le cancer
  • PAH: hydrocarbures aromatiques polycycliques; produits cancérigènes provenant  de  la combustion incomplète
  • PM10: particules en suspension dans l’air dont le diamètre est inférieur à 10 micromètres
  • EURO 6/VI : l’EURO 6/IV est la première directive de l’UE stipulant une limite basée sur le nombre de particules pour les poids lourds et les véhicules tout terrain. L’objectif est de protéger la santé humaine des particules très dangereuses, les particules dites ultrafines, qui ne sont pas comptabilisées dans les mesures de PM10 et PM2.5 en raison de leur masse quasiment négligeable.

Références:

  • Brook, Robert D. et al. (2010): AHA Scientific Statement: Particulate Matter Air Pollution and Cardiovascular Disease. An Update to the Scientific Statement from the American Heart Association. Circulation 121: 2331-2378.
  • ERS (2010): The ERS report on air pollution and public health. European Respiratory Society, Lausanne, Switzerland. ISBN: 978-1-84984-008-8
  • IARC (2012): “IARC: Diesel Engine Exhaust Carcinogenic”. Press Release No. 213. http://www.iarc.fr/en/media-centre/pr/2012/pdfs/pr213_E.pdf .
    (access: 14/02/14)
  • Kerr, Richard R. (2013): “Soot is Warming the World Even More Than Thought”. In: Science 339(6118), p. 382.
  • WHO (2014): “Burden of disease from Ambient Air Pollution for 2012.” http://www.who.int/phe/health_topics/outdoorair/databases/AAP_BoD_results_March2014.pdf?ua=1   (access: 26/08/14)

[1] Euro 6/VI, US/EPA/CARB, normes chinoises et équivalentes.

 

Prise de position