Des collectifs internationaux de médecins et de défense des droits humains appellent la Turquie à cesser de persécuter ses médecins


Dans une lettre expédiée aujourd’hui, quatre organisations internationales médicales et de défense des droits humains appellent les autorités turques à abandonner les charges infondées contre la direction de l’Association médicale turque (TMA) alors que le pays a un besoin urgent de médecins depuis le séisme du 6 février dernier, lequel a causé la mort de 45 000 personnes en Turquie et en Syrie.

Demain, le 6 avril, les onze membres du Conseil central de la TMA comparaîtront devant la 31e chambre civile de la capitale, Ankara. Ils risquent d’être démis de leurs fonctions électives au titre de la loi no 6023 sur la TMA. Avec plus de 110 000 membres disséminés dans tout le pays, la TMA est la plus grande association turque de médecins.

Les poursuites contre le Conseil central de la TMA, composé de certains des médecins les plus éminents de Turquie, sont le dernier exemple en date des attaques menées contre la profession médicale et d’autres professions indépendantes. C’est cette indépendance que le gouvernement considère comme une menace. Depuis au moins 2014, la TMA subit un harcèlement judiciaire, sous la forme de procès motivés par des raisons politiques, de perquisitions de ses bureaux, de menaces et d’emprisonnements.

Les chefs d’accusation sont les mêmes que ceux qui ont servi à condamner la Présidente de la TMA, la Dre Şebnem Korur Fincancı le 11 janvier dernier, lors d’un procès politique séparé. Après avoir été maintenue en détention provisoire pendant presque trois mois, elle a été condamnée à près de trois ans d’emprisonnement au motif fallacieux de « propagande terroriste » pour avoir exprimé un avis médical en appelant à une enquête indépendante sur l’usage présumé d’armes chimiques dans la région. Elle a été remise en liberté le 11 janvier en attendant l’audience d’appel.

« Accuser nos collègues turcs de mener des activités de promotion de l’usage de la violence n’est pas seulement incongru, c’est aussi une accusation infondée et malhonnête, a déclaré le Dr Frank Ulrich Montgomery, Président du Conseil de l’Association médicale mondiale. Nous sommes témoins de l’intégrité et de la loyauté de la TMA et de ses représentants et nous considérons ces allégations comme une insulte à l’ensemble de la profession médicale.

Le Dr Christian Keijer, Président du Comité permanent des médecins européens (CPME) a déclaré : “Les médecins européens appellent les autorités turques à préserver sans condition l’autonomie et l’indépendance de l’Association médicale turque. La profession médicale est essentielle à une société et le procès intenté contre ses dirigeants constitue une menace directe envers les patients, le système de santé et la population dans son ensemble”.
La Dre Michele Heisler, directrice des questions médicales au sein de Physicians for Human Rights, a déclaré : “La profession médicale est attaquée en Turquie. Nos proches collègues sont illégalement arrêtés, menacés de longues peines de prison et harcelés pour avoir seulement défendu l’éthique médicale, la possibilité de fournir des soins de qualité à leurs patients et le respect des droits humains. Cette persécution contre des médecins qui ne cherchent qu’à s’acquitter de leurs obligations professionnelles doit cesser sans délai”.

Erika Dailey, chargée des politiques et de la mobilisation au sein de Physicians for Human Rights a ajouté : “Il est choquant que des procureurs tentent d’empêcher des médecins de faire leur travail en période d’urgence sanitaire nationale. Après ce séisme dévastateur, les médecins sont plus nécessaires que jamais et devraient être protégés de l’ingérence du gouvernement”.

Le CPME, Physicians for Human Rights, Redress et l’Association médicale mondiale appellent les autorités turques à abandonner les charges qui pèsent contre les membres du Conseil central de la TMA et à faire cesser immédiatement le harcèlement qu’ils subissent, sous toutes ses formes.